CANNES 2012 : LES MARCHES DU PALAIS. INTOUCHABLES?

Quand on pense au Festival de Cannes on pense tapis rouge – montée des marches du Palais – photographes du monde entier ! L’image maitrisée (ou pas) des stars, les peoples, les paillettes et enfin, la sélection officielle, forment la face émergée du Festival de Cannes.

La montée des marches du Palais, pour accéder à la projection du Grand Théâtre Lumière est un moment clé du festival et est chargée de symbolique. Des stars, des people, des personnalités publiques ou des professionnels du cinéma profitent de cette montée pour se faire connaître, être vus, être au centre de l’attention. Et il faut dire que le pari est gagné : quelques centaines de photographes, journalistes, caméramans du monde entier les attendent tout autour du tapis rouge. Toutes ces personnes posent gentiment pendant de longues minutes avec leurs belles robes de soirée, leurs talons d’une dizaine de centimètres et leurs plus beaux sourires, et ainsi, la montée des marches devient une consécration en tant que « personne connue ». Nous retrouvons sur ces marches quelques minutes de gloire et d’adulation dont on prend rapidement goût et dont on ne voudrait pas se passer.

Cette année, Marion et Matthieu sont allés voir deux films dans la sélection officielle du festival. Ils sont tous deux en chaises roulantes, suite à un accident de voiture qui les a laissés invalides. Ils ont vu le film De rouille et d’os de Jacques Audiard, qui raconte l’histoire d’une jeune femme qui perd ses jambes dans un accident, ensuite le film de Michaël Haneke, Amour qui dépeint la triste réalité de la vieillesse : une personne âgée qui perd une partie de ses facultés locomotrices.

Ces deux films parlent des personnes à mobilité réduite suite à des accidents de la vie, mais qui veulent continuer à vivre normalement, en gardant leur intégrité et leur indépendance, sans devenir une charge pour leurs proches, tout comme Marion et Matthieu.

Ces films les ont touché au plus profond, mais ils ont amenés des interrogations la montée des marches. Ils avaient réussi à avoir des invitations pour l’Orchestre et donc la possibilité de monter les marches. Quelle ironie ! Ils auraient adoré accéder en haut des marches du Palais et bénéficier, malgré leurs handicap, de cette symbolique du festival, (afin d’être accueillies, comme tout le monde, par Thierry Frémaux) tout en bénéficiant de cette adulation des photographes et d’avoir les mêmes privilèges que leurs confrères.

Effectivement tous les lieux du festival sont prévus de rampes d’accès, d’ascenseurs ou d’autres dispositifs d’aide aux PMR (Personnes à mobilité réduite). Mais la Loi Handicap n’était pas ce qui les blessait.

Ils voulaient tout simplement bénéficier du protocole et le dispositif festivalier très spectaculaire. Ils se sont donc posé la question suivante : à quand la mise en place d’un dispositif alternatif de remontée des marches permettant à des personnes comme eux de monter les marches en toute honneur et fierté et vivre le rêve cannois accessible à tous ?

Raluca Calin

Doctorante à l'Université d'Avignon et des Pays de Vaucluse sous la direction d'Emmanuel ETHIS (Centre Norbert Elias, équipe Culture et Communication).